27/09/2012
Trop d’impôts tue l’impôt
L'impôt est une matière hautement inflammable, particulièrement en période électorale. A sa sortie de l'Elysée, où elle avait été conviée ce mercredi 6 juin pour discuter de la préparation du G20 de Mexico et du sommet de Rio sur le développement durable, Martine Aubry a dû faire une sorte de mise au point :
« Ce que j'ai dit sur la réforme fiscale, c'est la réforme fiscale qui est dans le projet de François Hollande » a assuré la première secrétaire du parti socialiste. Ni plus, ni moins.
C'est que la droite s'en donne à cœur joie depuis que la maire de Lille, interrogée lundi soir sur la façon de maîtriser les déficits publics , a estimé qu'il y avait « d'énormes » marges de manœuvre possibles en faisant rentrer « des impôts complémentaires ».
Aussitôt, François Fillon et Jean-François Copé, qui se disputent à l'UMP le leadership de la campagne des élections législatives, ont sauté sur ce terme « énormes » pour assurer qu'il y avait un « plan B » au lendemain des élections législatives des 10 et 17 juin prochains.
« Martine Aubry a vendu la mèche : ce sera le tour de vis fiscal le plus important jamais réalisé contre les classes moyennes » a déclaré le secrétaire général de l'UMP.
« Ce n'est tout simplement pas tenable, a renchéri François Fillon, nous avons un niveau de fiscalité particulièrement élevé en Europe et une croissance suffisamment faible pour qu'on ne vienne pas y ajouter des prélèvements obligatoires. »
L'attaque est évidemment à relativiser au regard de l'héritage laissé par la droite et du projet de Nicolas Sarkozy qui comportait 45 milliards d'euros de hausses d'impôts (et 80 milliards d'euros d'économies) pour ramener les comptes publics à l'équilibre en 2016.
Reste qu'à trop pratiquer l'habilité électorale et le non dit, le gouvernement prête le flanc aux attaques.
Depuis son installation le 17 mai, il n'annonce que les bonnes nouvelles, autrement dit des dépenses supplémentaires visant à plus de justice sociale : majoration de l'allocation de rentrée scolaire, hausse du SMIC, retour à la retraite à 60 ans pour ceux qui ont travaillé tot.
Il repousse au lendemain des élections législatives l'annonce et le paiement de la facture. C'est de bonne guerre, sauf que les français se demandent s'il n'y a pas un loup, s'ils ne devront pas être obligés de se serrer la ceinture bien au-delà de ce qui leur a été annoncé pendant la campagne, c'est-à-dire 40 milliards de prélèvements nouveaux et 50 milliards d'économies sur la dépense publique d'ici 2017.
Pierre Moscovici, le ministre de l'économie, promet que l'objectif des 3% de déficit sera tenu en 2013 mais il ne dit pas comment.
Or, les prévisions de croissance n'incitent pas à l'optimisme : elles sont en effet moins bonnes que prévu ( 1,3% en 2013 selon la commission européenne contre 1,7% prévus par l'équipe de François Hollande) sur fond de crise persistante de la zone euro .
En outre, les avertissements montent de toutes parts - de Bruxelles, de la Cour des comptes, de l'Inspection générale des Finances -, sur le dérapage des dépenses publiques et la nécessité de les contenir.
Sur ce chapitre, le gouvernement est muet. On sait juste que par rapport à son prédécesseur, il s'est compliqué la tâche en promettant de stabiliser et non de réduire les effectifs de fonctionnaires.
C'est ce non dit que la droite exploite autant qu'elle le peut avec une logique implacable : si les dépenses ne sont pas sévèrement contenues, il faudra bien augmenter les impôts, et bien au-delà de ce qu'a annoncé François Hollande pendant la campagne en promettant, pour les ménages, que seuls les « hauts revenus » et les « plus grandes fortunes » seraient touchés.
18:38 Écrit par OUTALHA dans FINANCE | Lien permanent | Commentaires (0) | Facebook | |
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POUR METTRE FIN AU DELIT DE FACIES
L'aval du premier ministre, Jean-Marc Ayrault, aux récépissés délivrés lors de contrôles d'identité par la police constitue une avancée importante. Si diverses communautés ont salué cette annonce, les syndicats de police ont fait connaître leur opposition face à ce qu'ils considèrent être une mesure précipitée et injuste, qui va entraver leur travail. En réalité, un mouvement s'est fait jour depuis un certain temps en France en faveur d'une réforme de la procédure du contrôle d'identité. Les pouvoirs trop larges accordés aux policiers en matière de contrôle des personnes sans soupçon raisonnable d'acte illégal ont conduit à des abus et ont alimenté le ressentiment, en particulier chez les jeunes issus des minorités.
Il est temps qu'une réforme vienne améliorer les relations entre la police et ces minorités, tout en assurant une action policière efficace. L'idée sous-jacente aux attestations de contrôle est simple : l'officier de police est tenu d'expliquer, sur place et dans un document écrit, la raison du contrôle d'identité, et la personne interpellée a droit à ce qu'on lui remette une preuve que la procédure a eu lieu. C'est un moyen d'améliorer à la fois l'efficacité de la police (devoir justifier le contrôle d'identité entraîne un usage plus judicieux de la mesure), et sa responsabilité (quiconque est interpellé sait comment et pourquoi la police est en train de faire usage de son pouvoir de contrôle de l'identité, et dispose d'une attestation qui facilitera le dépôt d'une plainte si la personne en question estime que ses droits ont été violés). C'est une bonne idée, qui est déjà appliquée dans d'autres pays avec des effets positifs.
Les inquiétudes selon lesquelles les attestations de contrôle empêcheraient la police de faire son travail ne sont pas fondées. En fait, l'expérience qu'en ont faite l'Espagne, la Hongrie, le Royaume-Uni et les Etats-Unis montre que l'utilisation d'attestations de contrôle peut contribuer à faire diminuer les interpellations arbitraires non fondées et augmentent le taux de "réussite", à savoir le pourcentage de contrôles débouchant sur l'application d'une loi, sous la forme d'une amende ou d'une arrestation. Pour dire les choses simplement, lorsque les policiers sont tenus d'expliciter les motifs d'une interpellation, les interpellations effectives deviennent à la fois plus justifiées et plus efficaces pour découvrir et prévenir les comportements illégaux.
Selon les policiers, la proposition d'émettre ces récépissés jette une suspicion infondée sur les forces de l'ordre. Pourtant, il existe des inquiétudes fondées de profilage ethnique et de pratiques abusives pendant les contrôles d'identité de la part de la police. Les données statistiques et empiriques laissent penser que les policiers prennent la décision de contrôler telle ou telle personne en fonction de son apparence, notamment ethnique, plutôt que du comportement réel de l'individu. Le fait d'être contrôlés de manière répétée ou d'être ciblés au sein d'une foule renforce chez les jeunes issus des minorités le sentiment d'être ciblés en raison de qui ils sont, et non de ce qu'ils font.
Les traitements irrespectueux et humiliants lors des contrôles d'identité sont un autre problème. Les dizaines d'adolescents et de jeunes adultes que j'ai interrogés à Paris, Lille et Lyon se plaignaient tout autant de la manière dont ils avaient été traités que du fait d'avoir été contrôlés. Beaucoup se sentent insultés par l'usage du tutoiement par les policiers à leur égard. Le ministre de l'intérieur, Manuel Valls, a rappelé aux agents de la force publique qu'ils sont censés recourir au vouvoiement.
Et alors qu'un simple contrôle d'identité ne devrait durer que quelques minutes et se résumer à la présentation de la carte d'identité ou autre preuve d'identité à la demande d'un policier, les jeunes issus des minorités sont soumis à des interrogatoires prolongés, doivent vider leurs poches, laisser fouiller leurs sacs et subissent des fouilles corporelles intrusives. Des témoignages font état d'enfants de 13 ans fouillés par palpation, mains au mur, jambes écartées.
De toute évidence, les contrôles d'identité abusifs nuisent aux relations entre la police et les communautés, ce qui, à long terme, paralyse la capacité de la police à détecter et prévenir la criminalité. Des relations tendues avec les communautés au sein desquelles ils travaillent rendent plus difficile encore le travail déjà stressant des policiers, enveniment leurs conditions de travail et leur moral, et parfois accroissent le risque pour ces derniers d'être mis en danger.
C'est pourquoi les attestations de contrôle devraient faire partie d'une série de mesures visant à lutter contre les contrôles d'identité abusifs. Jusqu'à ce jour, la police dispose de pouvoirs trop larges en matière de contrôle des personnes, y compris en l'absence de toute preuve ou indication de comportement illicite. Les policiers ont dès lors trop de latitude pour agir à leur entière discrétion, ce qui ouvre la voie aux abus. La loi devrait énoncer clairement que tous les contrôles d'identité doivent être fondés sur un soupçon raisonnable d'acte délictueux lié à un comportement effectif.
Les policiers ne devraient effectuer de palpations que lorsqu'ils ont des raisons concrètes de soupçonner qu'une personne transporte un objet dangereux ou illicite. Des règles spécifiques devraient être adoptées lorsque ces palpations corporelles concernent des enfants (une personne mineure). Accompagnée de directives claires, d'une formation appropriée et de l'obligation d'indiquer la base légale du contrôle d'identité sur le récépissé, cette réforme devrait aider à réduire les interpellations arbitraires qui nourrissent le ressentiment et gaspillent des ressources policières précieuses.
Des mesures concrètes visant à réduire les abus changeraient la vie quotidienne des gens. Les attestations de contrôle sont un élément important de cette équation. Un dialogue constructif avec la police et le démarrage d'un projet pilote dans une ville pourraient s'avérer nécessaires pour bâtir un consensus. Mais il devrait être clair pour chacun que combler le fossé qui sépare la police française et les jeunes des minorités nécessitera une approche globale, dont l'attestation est un élément.
18:35 Écrit par OUTALHA dans societe | Lien permanent | Commentaires (0) | Facebook | |
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