Pourquoi cette levée de boucliers chez certains nantis contre la taxation, exceptionnelle et limitée dans le temps, des hauts revenus ?

06/02/2013

L’INSECURITE CULTURELLE

L'atomisation des structures sociétales fait saillir l'image des communautarismes ou supposés tels. Pour des pans de la société, c'est une insécurité que représente ce monde où tout cadre unitaire s'estompe, où ceux qui ne sont pas en "mouvement" seraient disqualifiés. Ceux qui y appartiennent exigent un retour à une société construite, avec une hiérarchie de valeurs et de travail légitime.

Cette dynamique a contribué à la diffusion d'une fiction sociale dans laquelle les populations d'origine arabo-musulmane représentaient quant à elles un corps unifié socialement, culturellement et religieusement.

Cette cristallisation entre la représentation d'un "nous" composé d'individus épars en concurrence, et un "eux" imaginé comme solidaire, entraîne dans l'imaginaire des populations une coagulation des insécurités : physique, économique, culturelle, elles ne constituent en fait qu'un seul bloc pour de nombreuses personnes, déplaçant ainsi sur une critique des populations d'origine arabo-musulmane le rapport entre les transformations de l'économie, des technologies et de nos modes de vie.

Ce sentiment d'insécurité culturelle est encore plus vivace chez ceux à qui est affirmé qu'ils ne sont pas adaptés à la mondialisation et à ses conséquences sur nos structures économiques.

Tandis que cette analyse s'esquissait par des échanges entre spécialistes de la recherche en sciences sociales, elle était reprise à la volée dans un champ médiatique structuré par la posture éthique et esthétique, en fait une société du spectacle assez révélatrice de chaos social sus-décrit.

Le résultat fut une accumulation de contresens : dénonciation d'un "concept d'extrême droite", voire admonestation d'une "sécurité identitaire" destinée à contourner la question de l'insécurité économique ou, à l'opposé, valorisation de la défense des "petits Blancs"...

Or, l'hypothèse de l'insécurité culturelle n'est pas un thème identitaire destiné à masquer la question sociale, mais relève d'une question socio-économique qui a une implication culturelle.

Pour la contrer, il faut répondre à l'atomisation et la à précarisation du travail. C'est pourquoi la droite populaire et la Droite forte ne peuvent concurrencer le FN : elles avalisent sa perception insécurisée, mais n'y apportent pas comme lui une réponse globale, avec la promotion frontiste d'une souveraineté nationale, identitaire, populaire et sociale.

On ne saurait pour autant considérer que la gauche a, en la matière, les coudées franches. Car quand bien même réussirait-elle socialement qu'il lui resterait encore à reproduire du commun. Quoique cela relève plus du législateur que du chercheur, quelques pistes peuvent être évoquées.

A l'encontre de la guerre des mémoires communautaires et de leur quête du monopole du capital symbolique pourrait être instauré, tout le long du cursus scolaire, un cours d'histoire-géographie de la France, venant compléter le cours général actuel et instituant un socle culturel commun.

Bien sûr, il aborderait tous les "passés qui ne passent pas", mais sous l'angle du savoir, et ne se confondrait pas avec les futurs cours de "morale républicaine" qui doivent, eux, fournir un bagage non pas scientifique mais civique.

Plutôt que de signifier à une moitié de l'électorat que son choix partisan n'est pas représenté, légitimant l'idée que l'Etat est aux mains d'oligarques, le mode de suffrage universel direct à la proportionnelle pourrait être appliqué au Sénat sans nullement déstabiliser nos institutions.

Un service civique pourrait être rétribué en bonus aux concours administratifs ou à la formation professionnelle.

A toute strate administrative devrait correspondre une existence civique, restaurant le sens du bien commun, où il pourrait être possible d'organiser, par l'exécutif comme sous initiative populaire, un référendum portant sur des questions relatives aux prérogatives de cette structure.

On le voit, envisager le rôle de l'insécurité culturelle dépasse l'enjeu premier de compréhension des dynamiques des droites. Il s'agit de répondre à la façon dont l'insécurité culturelle surexcite l'"altérophobie".

Cette crispation contre l'autre, depuis la fin du XIXe siècle, joue sur une assignation de l'individu à un groupe ethno-culturel, souvent cultuel - même les législations racistes du IIIe Reich et de Vichy définissaient la "race" biologique juive par la confession des ascendants des personnes concernées.

L'"altérophobie" est devenue, comme le montre l'actualité jour après jour, l'un des phénomènes sociaux les plus prégnants, alors qu'assigner l'individu à une identité est le contraire de la République qui a fait des citoyens libres liés par un contrat social.

Ainsi, chercher à répondre à l'insécurité culturelle ne se limite pas à réintégrer les électeurs frontistes à l'électorat des partis de gouvernement. C'est retrouver l'esprit de Jaurès : intégrer le peuple à la République, car l'un et l'autre ne font qu'un.

18:36 Écrit par OUTALHA dans Sports | Lien permanent | Commentaires (0) |  Facebook | | |  Imprimer | |

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