27/05/2012
Les journalistes d’Al Maghribya dénoncent les pressions de la direction générale : Pas de printemps pour le groupe Maroc Soir
Après avoir observé la grève de la signature de leurs articles de presse puis porté le brassard, les journalistes d’Al Maghribya, adossés au Syndicat national de la presse marocaine ont observé jeudi 24 mai un sit-in de protestation devant les locaux de Maroc Soir pour condamner d’abord et avant tout le renvoi, sans autre forme de procès, de l’un de leurs collègues d’Al Maghribya. «C’est une forme de pression qui a été exercée contre cinq journalistes de ce journal en les obligeant à accepter leur départ volontaire. Ce qui est en fait un départ obligatoire. C’est la méthode trouvée par la direction générale pour casser le mouvement, semer la peur et la division.
Nous sommes encore quatre à résister aux pressions du départ qui n’a de volontaire que le nom», nous apprend l’un des cinq journalistes qui a été empêché par les agents de sécurité d’accéder à la rédaction. Les revendications des journalistes d’Al Maghribya sont essentiellement axées autour de l’amélioration de leurs conditions de travail de journalistes et de l’application de la convention collective. Ils sont nombreux à dénoncer leurs salaires de base, «dérisoires». «Des salaires de base qui peuvent parfois ne pas dépasser les 3000 dhs. Ce qui prouve bien que nous sommes face à une violation grave de la convention collective», témoigne un journaliste du groupe.
Les journalistes à la marche de dimanche
Les retenues sur salaires sont elles aussi fustigées par la rédaction d’Al Maghribya. Le groupe Maroc Soir a en effet instauré un système de retenues sur salaire pour tout journaliste arrivé «en retard» ou absent «sans aucune autorisation ou justification». «C’est notre dignité de journalistes professionnels qui est tout bonnement bafouée. Un retard de 20 mn est assimilé à une absence d’une demi-journée. Résultat, notre salaire est amputé d’une demi-journée de salaire. Faites vos comptes si un journaliste accumule deux, trois, quatre retards. A Maroc Soir, on est visiblement incapable de comprendre que le travail journalistique est une question de production et de présence sur le terrain, pas derrière un bureau. Un journaliste n’est sûrement pas un fonctionnaire qui doit pointer. Comment alors calculer le temps passé à couvrir une conférence qui se termine tard le soir, un congrès qui a lieu durant le week-end ou encore une interview effectuée le matin et qui dure plus que prévu?» se demande, ironique, cette journaliste également dans le mouvement de protestation. Quelles sont les explications du top management du groupe Maroc Soir ? Et comment explique-t-il la radicalisation de ce mouvement de protestation ? S’agit-il de départ volontaire ou de licenciement de journalistes ? Vendredi matin, «Libération» a tenté sans succès de joindre le directeur général du groupe Maroc Soir, Mohamed Jouahri, pour recueillir sa version des faits. Les actions des protestataires du journal Al Maghribya sont en train de prendre une nouvelle dimension. Le Syndicat national de la presse marocaine compte organiser dans les prochains jours une action de solidarité de toutes les rédactions du pays avec les journalistes d’Al Maghribya. Et dimanche 27 mai, c’est cette même solidarité qui s’exprimera à l’occasion de la marche de protestation populaire qu’organisent les deux centrales syndicales, la FDT et la CDT, à Casablanca.
20:55 Écrit par OUTALHA | Lien permanent | Commentaires (0) | Facebook | |
|
Imprimer | |
14/02/2012
L’UMA, fausse union ou union faussée ?
Fondée le 17 février 1989 à Marrakech, date à laquelle le Traité constitutif de l'Union du Maghreb arabe, a été signé par les cinq chefs d’Etat à Marrakech, l’Union du Maghreb arabe (UMA) ne cesse, depuis lors, de faire du surplace. Bien que les responsables des cinq pays membres (Algérie, Libye, Maroc, Mauritanie, Tunisie) continuent certes de se rencontrer périodiquement, les résultats se font attendre. Les échanges commerciaux intermaghrébins restent très faibles et ne répondent en aucun cas ni aux aspirations des instigateurs de l’union ni à celles des peuples de la région.
Le Sommet de Marrakech avait adopté une Déclaration solennelle relative à la création de l'UMA ainsi que le Programme de travail de l'Union.
L'organisation emploie une quarantaine de salariés, dont une quinzaine de cadres, soit trois par pays. Son budget – 1,85 million de dollars – est exclusivement alimenté par les cotisations des pays membres : 370.000 dollars par an et par pays. Le loyer de son siège (74.000 dollars) est pris en charge par le Maroc. A la fin de l'année 2002, seuls deux pays avaient acquitté la totalité de leurs contributions: le Maroc et la Tunisie.
Telle est la triste histoire d'une institution handicapée de naissance: elle aura 23 ans le 17 février 2012, mais qui ne marche toujours pas, n’agit pas et ne fait rien d'autre que coûter un peu plus d'argent chaque année à ceux qui continuent à s’acquitter de leurs quotes-parts.
Mais il y a pire, c’est d’avoir été condamnée dès sa naissance à la paralysie par un conflit entre ses deux principaux membres, l'Algérie et le Maroc, né à la fin de 1974, il y a près de trente-huit ans, et qui s'est révélé à ce jour inextricable.
Tout au long de ses 23 ans d'existence, l'UMA n'a été capable ni d'aider ses deux principaux membres à résoudre le problème qui les oppose, ni de s’adapter au conflit. Alors elle persévère dans son non-être et fait semblant d'être.
Comme d'autres "organisations internationales" qui ne servent qu'à faire vivre des fonctionnaires, à faire voyager des ministres, à entretenir de faux espoirs, et qui ont pour noms Ligue arabe, Mouvement des non-alignés...
Pendant ce temps, les gens sérieux, Européens et Asiatiques en particulier, dépassent leurs conflits séculaires et construisent de vraies unions.
Le Maghreb arabe a besoin aujourd'hui d’un élan militant en vue de relever tous les défis auxquels la région fait face, notamment les aspirations légitimes de la jeunesse à réaliser le développement durable et la sécurité alimentaire et à lutter contre toutes les formes d'extrémisme.
Avec une superficie de plus de six millions de kilomètres carrés, une population qui dépasse les cent millions de résidents, des langues et patrimoines civilisationnels communs, le Maghreb, en cela seulement, est une configuration géopolitique qui mérite le respect de tout observateur étranger.
Ouverte sur une bonne partie de l’Europe, sur l’Atlantique, sur toute l’étendue de l’Afrique profonde et sur le monde arabe, cette partie de la planète habitée semble exister dans une forme de léthargie, de fatalité figée dans le seul souci de ne pas vouloir évoluer.
Le Maroc qui est en train de procéder à de profondes réformes institutionnelles se pose des questions à propos des intérêts socioéconomiques avec les partenaires maghrébins et européens, dans les volets agricoles, touristiques, culturels et industriels.
Les surfaces agricoles utiles réunies des seuls pays de la Tunisie, de l’Algérie et du Maroc et les ressources en eau n’ont rien à envier aux grandes étendues arables en Occident irrigué. De même pour les sites naturels de villégiature.
Pendant que la manne hydrocarbure dans le désert algérien et libyen pourrait contribuer non seulement à moindre coût aux besoins énergétiques destinés aux activités industrielles respectives, aux services, mais aussi à la disponibilité régulière d’une réserve de change communautaire capable de renflouer de grandes activités socioéconomiques générant l’emploi et donc, la richesse.
Durant la brève période des deux Sommets de l’UMA, à Alger puis à Marrakech, vers la fin des années quatre-vingts, un formidable mouvement de circulation intermaghrébin avait provoqué dans les mentalités citoyennes confondues des réactions de réflexe de proximité.
Mais il resterait à résoudre le dossier du Sahara qui en vérité n’en a jamais été un. Un problème de quelque trois cent mille kilomètres carrés de désert et trois cent mille habitants fait monter le cholestérol et la tension artérielle à plus de soixante millions de Maghrébins dont beaucoup ne comprennent pas la fermeture de plus de mille trois cents kilomètres de frontières.
Le nouveau président tunisien Moncef Marzouki a entamé le 8 février 2012 un périple qui l’a mené au Maroc, en Mauritanie et en Algérie. Le président tunisien a rencontré S.M le Roi Mohammed VI à Rabat. C'est le premier déplacement depuis sa prise de fonction à la mi-décembre avec pour objectif de relancer l'Union du Maghreb arabe léthargique depuis plusieurs années.
Depuis son arrivée au pouvoir, Moncef Marzouki n'a pas manqué une occasion pour relancer l'idée d'un grand Maghreb allant de Nouakchott à Benghazi.
Début janvier en Libye, le président tunisien propose de faire des deux pays post révolutionnaires le noyau de l'UMA, l'Union du Maghreb arabe. Quelques jours plus tard, l'idée est relancée à Tunis en présence du président algérien Abdelaziz Bouteflika lors de l'anniversaire de la révolution tunisienne.
L'UMA a été fondée en 1989 mais n'a jamais vraiment dépassé le stade symbolique. Son conseil composé des cinq chefs d'Etat ne s'est pas réuni depuis 1994. Et pour cause, les coups de sang de l'ex-leader libyen Mouammar Kadhafi, mais aussi les différends entre l’Algérie et le Maroc
Cette fois, Moncef Marzouki a voulu mettre à profit ses six jours de tournée pour réanimer l'UMA selon ses mots. L'ex-défenseur des droits de l'Homme rêve d'un « Maghreb des libertés » dont les ressortissants auraient le droit de circuler et d'investir librement. Mais aussi d'une union sécuritaire pour réduire la contrebande et le trafic d'armes avec une intégration économique renforcée pour faire baisser le chômage et l'immigration clandestine. Car Moncef Marzouki en est persuadé, 2012 sera l'année du Maghreb.
L’intégration régionale de l’Afrique du Nord apparaît pour de nombreux experts comme l’une des réponses aux difficultés que rencontre la région : chômage, pauvreté, mauvaise gouvernance, violence sociale, etc. Récemment, la directrice du FMI a appelé à un resserrement des relations maroco-algériennes comme voie de salut pour les deux pays en mettant en exergue leur complémentarité.
Les économies du Maghreb se tournent le dos et les gouvernants ont des relations marquées par une méfiance mutuelle.
Dans cette perspective, seule la démocratie est à même de faire sortir les dirigeants d’une logique nationale afin de mettre en pratique les conditions d’une intégration régionale attendue par l’opinion.
L’intégration régionale ne peut se faire qu’à travers la démocratisation.
Les ondes de choc des révoltes sociales qui ont éclaté récemment dans le monde arabe, ont secoué le Maroc et l’Algérie. Les deux pays, qui devraient annoncer bientôt la normalisation de leurs relations, sont désormais conscients de la nécessité de répondre aux aspirations de leurs peuples et sont condamnés à marcher ensemble pour l’intérêt du grand Maghreb.
Au Maroc, l’Etat entreprend aujourd’hui des réformes profondes. Pour sa part, l'Algérie a annulé l’Etat d’urgence décrété dans le pays depuis 18 ans et s’apprêterait à ouvrir une nouvelle page de son histoire avec le Maroc.
Aujourd’hui, le conflit entre le Maroc et l’Algérie semble désuet. Les deux pays doivent faire face, ensemble, aux grands défis qui les attendent. C’est inévitable et c’est dans l’union que les peuples de la région recouvreront leur dignité bafouée au fil du temps.
Les Etats-Unis ainsi que l’UE ont tout à gagner dans cette union, car en s’unissant, les pays du Maghreb formeront un véritable rempart contre l’extrémisme et AQMI qui sévit au Sahel.
Il est désormais temps que les efforts se conjuguent, que les volontés l’emportent sur les handicaps, et que l’UMA ressuscite.
Paru sur LIBERATION
Lundi 13 Février 2012
Par Lhassan Outalha
13:02 Écrit par OUTALHA dans MAGHREB | Lien permanent | Commentaires (0) | Facebook | |
|
Imprimer | |