07/12/2011
CARTON ROUGE POUR LA DIASPORA
« Le vote de la diaspora pose d’insolubles problèmes à toutes les démocraties, mêmes celles des pays industrialisés ».
Que pèse un Marocain ? Politiquement, dans le jeu formel de la démocratie libérale, il pèse une voix. Mais plus précisément, en termes de richesses produites, de dépenses allouées, d’heures dépensées par les administrations ? Des réponses existent, précises encore que changeantes selon les politiques et les aléas, et qui fondent en principe les programmes des partis et les politiques publiques des gouvernements.
Dans le cadre du territoire national, un tel calcul – un Marocain, c’est tant et tant, validé par un bulletin de vote – est relativement simple, une fois les données obtenues. Mais que vaut-il dans la diaspora ? Un Marocain étudiant en Allemagne, travaillant en Espagne, payant ses impôts en France, a-t-il le droit de voter et d’envoyer des élus dans la Chambre basse ? La réponse a été différée au profit d’une solution temporaire : le vote par procuration des Marocains de l’étranger.
Diasporas et démocratie
Le droit de vote des diasporas des pays du Sud est source d’inquiétudes : sur quoi se prononcera un citoyen indépendant des politiques publiques de son pays d’origine ? Les Tunisiens de France ont massivement voté Ennahda. échec de l’intégration en France ? Efficacité de la mobilisation islamiste ? On peut y voir surtout une condamnation ferme de la part des Tunisiens de l’étranger d’un pouvoir dont ils ne tiraient aucun bénéfice, avec lequel ils n’avaient guère de rapports, peu de transactions. Ils n’avaient à voter, du coup, que sur des considérations idéologiques ou symboliques pures. Surtout qu’un citoyen du Sud vivant dans un pays développé aurait tendance, naturellement, à établir une comparaison très défavorable entre son pays d’accueil et son pays d’origine : le Mexicain vivant aux états-Unis, le Marocain vivant en France, le Turc vivant en Allemagne ne seraient pas tendres envers leurs gouvernements nationaux respectifs. Autrement dit, les élections législatives tendent, pratiquées hors du territoire national, à se transformer en vote plébiscitaire, sanctionnant en bloc la classe politique en place et accordant une prime à l’opposition la plus populiste.
Mais le vote de la diaspora pose d’insolubles problèmes à toutes les démocraties, mêmes celles des pays industrialisés.
Voter, c’est vivre sur place
Car la démocratie fut inventée pour promouvoir une relation politique au territoire sur lequel on vit, contre la relation communautaire à la tribu à laquelle on appartient. Un Grec, lorsqu’il quittait Athènes pour aller vivre en Sicile, ne votait plus sur l’Agora athénienne. Il recréait, dans sa nouvelle cité, une nouvelle démocratie. Soulignons au passage ce rapport entre démocratie et colonisation, et précisons que la démocratie fut pensée pour gérer les affaires de la cité, les plus prosaïques – l’impôt – comme les plus graves – la guerre –, affaires qui nécessitent la présence physique du citoyen, non une vague appartenance symbolique.
La langue arabe, dans son usage moderne, est éloquente concernant ce lien entre citoyenneté et territoire : les termes désignant la patrie – watan –, le citoyen – mouwâtin – et la colonisation ou l’occupation d’un espace – istîtân – sont issus d’une même racine. Quelle citoyenneté (mouwâtana) accorder à celui qui a quitté la patrie (watan) où elle s’exerce ?
Voter, c’est donc vivre ici et maintenant, et le vote d’un émigré pourrait sembler aussi incongru que celui d’un mort. Mais il y a autre chose. Les démocraties modernes se sont développées parallèlement à la notion de nationalisme. On demandait aux citoyens de voter également pour la vision qu’ils avaient de leur pays : le vote des émigrés en devenait légitime. Là consiste sans doute le problème central pour le vote de la diaspora marocaine. La vision qu’on a de notre nation siège ailleurs que dans le Parlement. Et personne n’attend des députés qu’ils nous proposent un nouvel horizon historique. En réalité, tant que les prérogatives du gouvernement et du Parlement dont il est issu se limiteraient à une gestion socioéconomique des affaires publiques, le vote des émigrés marocains posera problème. Dans le jeu auquel les Marocains sont désormais invités à participer, c’est carton rouge pour la diaspora, dès le sifflet de départ.
26 novembre 2011
18:01 Écrit par OUTALHA dans MAROC | Lien permanent | Commentaires (0) | Facebook | |
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LA COURSE BAT SON PLEIN
7 décembre 2011
La composition du prochain gouvernement étant de plus en plus claire chez les partis participants, c’est déjà la ruée vers les postes. Istiqlal et PJD se tailleront la part du lion et commencent déjà à laisser filtrer les premiers noms. Avant-goût.
Abdelilah Benkirane souhaite réduire au maximum son cabinet, chose qui n'est pas pour plaire à ses futurs alliés.
On ne connaît pas encore la configuration définitive du prochain gouvernement que la course aux postes ministériels a déjà commencé. Le secrétaire général du parti au pouvoir et chef de gouvernement, Abdelilah Benkirane, a annoncé la couleur en précisant que son cabinet sera réduit au minimum, soit un maximum de 25 ministres et secrétaires d’Etat. Autant dire que la bataille pour les postes sera rude. Et chaque parti y va de ses préférences, en termes de portefeuilles comme en profils. Dans le seul Istiqlal, une bonne petite centaine de candidatures a d’ores et déjà été transmise au secrétaire général et désormais ancien Premier ministre Abbas El Fassi. S’il a accepté de s’allier au PJD dans la formation du futur gouvernement, le parti de la Balance compte s’accaparer un minimum de 10 ministères.
Les secteurs de prédilection de l’Istiqlal restent les département dits techniques, l’Equipement et les affaires économiques en premiers. Pour le premier département, on parle ainsi du retour de Bouâmar Taghouane, qui a déjà occupé ce poste. Pour le second, c’est (toujours) le nom de Nizar Baraka qui circule. Plus que des postes ministériels, l’Istiqlal demande également une place au soleil du Parlement, en revendiquant la présidence de la Première Chambre.
Ramid, Othmani, Hakkaoui et les autres
Le PJD, lui, devra garder les postes clefs, et quelques uns des départements de souveraineté. A commencer par la Justice. Et c’est le tonitruant Mustapha Ramid, avocat et président du Forum El Karama (Dignité), qui milite notamment pour la libération des détenus politiques, qui part favori pour occuper un poste aussi sensible qu’attendu. Rappelons que Ramid avait refusé de se porter candidat lors des dernières élections. Pour les affaires étrangères, et si jamais le poste est politisé, c’est un certain Saâdeddine El Othmani qui dispose des plus fortes chances de passer. El Othmani est non seulement le président du Conseil national du parti mais aussi de sa Commission des relations internationales.
Un conseil de sages en vue
Dans sa marche vers la « présidence » du gouvernement, Abdelilah Benkirane ne compte pas s’entourer que de ministres, mais aussi d’anciens responsables ayant fait leurs preuves par le passé. On parle ainsi de la possible création d’un Conseil des sages qui réunira des noms comme M’hamed Boucetta, un des fondateurs de l’Istiqlal, et plusieurs fois ministres sous Hassan II, Ismaïl Alaoui, ancien secrétaire général du PPS et deux fois ministres (Education et Agriculture) Driss Jettou, le très respecté ancien Premier ministre et celui-là même à qui on doit bien des projets structurant et plans sectoriels. Le conseil devra aussi compter Ahmed Ossman, le fondateur du RNI et ancien Premier ministre, Mahjoubi Aherdane, Abderrahmane Youssoufi… et Mohamed Bensaïd Aït Idder, une des plus grandes figures de la résistance et de la lutte de la gauche après l’indépendance, aujourd’hui érigé en symbole par le Mouvement du 20 février.
Autre poste clé, les Finances. Le PJD, déterminé à garder les finances du pays sous sa supervision, serait déjà en train de préparer Mohamed Najib Boulif pour le poste. Docteur d’Etat en sciences économiques, avec pas moins de six ouvrages à son actif, Boulif est tout simplement “M. Loi de Finances” du PJD au Parlement. Autant dire qu’il est fait pour le poste. Idem pour l’agriculture, département pour lequel Réda Benkhaldoune part favori.
Autre nom, autre département, celui de Bassima Hakkaoui à la tête du département des affaires sociales, de la solidarité et de la famille. Le charismatique Mustapha El Khalfi, véritable architecte du programme du PJD, est, lui, appelé à occuper le poste de chef de cabinet d’Abdelilah Benkirane.
Au sein des deux autres formations devant composer l’exécutif, à savoir le PPS et le Mouvement populaire, ce sont surtout les noms des secrétaires généraux respectifs de ces deux partis qui montent à la surface.
17:21 Écrit par OUTALHA dans MAROC | Lien permanent | Commentaires (0) | Facebook | |
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