29/11/2012
LA COMPETITIVITE
Jamais auparavant un concept n’a été aussi galvaudé que ce mot magique, voire mystérieux, de compétitivité. Que signifie-t-il au juste ? Quelle(s) acception (s) revêt-il ? Comment est-il mis en évidence dans la réalité concrète par les concernés à savoir les différents agents économiques et en particulier les entreprises ?
En langage courant, être compétitif signifie être en position favorable d’affronter la concurrence externe, c’est-à-dire avoir un avantage concurrentiel permettant de se positionner favorablement pour gagner de parts de marché à l’international ou tout au moins préserver celles qui sont acquises. Comme on est dans une situation d’économie ouverte, cet avantage concurrentiel peut également porter sur le marché domestique qui est la cible des concurrents étrangers. Autrement dit, la concurrence interne et la compétitivité externe forment un couple indissociable. Une entreprise performante sur le marché local a de fortes chances de le devenir sur le marché international.
Dans un environnement où la concurrence se fait de plus en plus vive, de plus en plus acharnée, il faut se lever tôt pour avoir une place au soleil ! Les paresseux, les partisans du moindre effort, cherchent à y parvenir par la voie facile en optant pour une conception étriquée de la compétitivité, celle qui consiste à comprimer les salaires et à exploiter les travailleurs d’une manière atroce qui rappelle par certains aspects la phase de l’accumulation primitive du capital et le modèle de croissance extensive qui s’ensuivit. Cette «compétitivité-coût» a atteint aujourd’hui ses limites et elle est battue partout en brèche. Seuls quelques nostalgiques ou «fondamentalistes», en retard de plusieurs guerres, y tiennent encore !
Le même sort est réservé à la «compétitivité-prix», acquise par une baisse drastique des prix ou le recours à la «dévaluation compétitive». La baisse des prix peut être obtenue par une baisse du niveau de l’imposition (le cas des entreprises qui plaident en permanence pour «moins d’impôt») ou par les «économies d’échelle» en produisant à grande échelle. La dévaluation, à son tour, n’est pas toujours efficace et ce pour deux raisons essentielles : d’une part, elle peut entrainer la hausse des prix des intrants dans la mesure où les produits exportés ont un coefficient d’importation élevé ; d’autre part, elle n’a aucun effet dans une situation où les compétiteurs recourent au même procédé.
Ce qui nous amène à plaider pour la mise en œuvre de la «compétitivité globale» qui ne se limite pas à des actions ponctuelles et à quelques gains dans le court terme. La compétitivité globale se construit sur le moyen et long termes en se dotant d’une stratégie et d’un modèle de croissance bien définis. Selon l’économiste Porter, qui passe pour un maître dans ce domaine, l’avantage concurrentiel national s’appuie sur quatre déterminants : les facteurs (main-d’œuvre qualifiée et qualité de l’infrastructure) ; la demande (domestique); les industries amont ; la stratégie, la structure et la rivalité des entreprises. Ces quatre déterminants sont en interaction entre eux.
Pour dire les choses autrement, la compétitivité globale peut être obtenue en disposant d’une main-d’œuvre bien qualifiée, d’une infrastructure adéquate, d’une administration facilitatrice et moins tatillonne, d’une justice véritablement indépendante et efficace, d’un environnement culturel favorable à l’innovation et au goût du risque, d’une recherche-développement performante…
L’on mesure de la sorte le chemin qui reste à parcourir par le Maroc pour devenir compétitif et jouer dans la cour des grands. Avec 66 % des travailleurs, sans diplôme et sans aucune qualification, il ne peut pas aller très loin ! Avec des investissements insignifiants dans l’innovation et la recherche-développement, il est structurellement handicapé ! Avec une administration «casse-tête» grâce au labyrinthe des procédures et une justice noyée dans la corruption et le déficit de professionnalisme, l’avenir ne s’annonce pas sous de meilleurs auspices.
La «voie de l’émergence» se situe à ce niveau là et pas ailleurs. Le moment est venu pour mettre fin aux discours pompeux et improductifs. Mieux vaut de parler moins et de travailler plus…
09:56 Écrit par OUTALHA dans Economie | Lien permanent | Commentaires (0) | Facebook | |
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LES MEDIAS ET LE MOYEN-ORIENT
« Le Moyen-Orient dans les médias » était le thème d’un débat organisé par l’École d’Automne de l’École de Gouvernance et d’Économie de Rabat (EGE).
Parmi les intervenants, Alain Frachon, journaliste au Monde et Abdel Wahab Baderkhan, ancien rédacteur en chef d’Al Hayat.
Sami Al Ajrami est le seul journaliste palestinien à couvrir la guerre à Gaza pour des médias israéliens. Correspondant pour le quotidien Maariv, Al Ajrami a toujours tenu à faire son travail journalistique avec la plus grande objectivité possible. Il n’utilise ni les termes « criminels sionistes » ni « terroristes » et refuse de qualifier l’armée israélienne d’armée de « défense ». « Je peux donner l’information de manière humaine et compréhensible à mon public israélien », déclare-t-il au site d’information américain, The Daily Beast. De part l’audience à laquelle il s’adresse, Sami Al Ajrami considère qu’il ne peut se permettre de parler uniquement des Israéliens ou des Palestiniens. « Je compare les deux misères », explique-t-il. Pourtant, depuis que sa fille âgée de 9 ans a été blessée suite à un raid israélien et qu’on a dû lui amputer trois doigts le 15 novembre dernier, l’avis du journaliste semble évoluer. C’est pourtant uniquement grâce au réseau professionnel du journaliste en Israël que sa fille a pu se faire soigner dans un hôpital israélien. Au-delà du cas exceptionnel de Sami Al Ajrami, qu’il s’agisse de journalistes arabes ou occidentaux, le Moyen-Orient reste un sujet délicat. La couverture médiatique de la région était le thème d’une des conférences de l’École d’Automne de l’École de Gouvernance et d’Économie de Rabat (EGE) mercredi dernier. Le panel a réuni un journaliste français, Alain Frachon du Monde, et un journaliste panarabe, Abdel Wahab Baderkhan, ancien rédacteur en chef d’Al Hayat.
Groupes de pression
Abdel Wahab Baderkhan indique que les médias panarabes permettent une certaine audace et transcendent les autorités nationales. « Il est clair que les groupes de pression existent. Rien n’est écrit, mais implicitement, à Al Hayat, nous savions qu’il ne fallait pas se mettre à dos les autorités saoudiennes. Mais, malgré cela, nous avons tout de même réussi à dépasser les limites habituelles de la presse nationale », se félicite-t-il. Pour Baderkhan, la presse panarabe a encouragé la création de médias transnationaux et a largement influencé les lignes éditoriales des médias nationaux. Pour Alain Frachon, par contre, le principal groupe de pression est le journaliste lui-même, son identité et ses convictions. Le journaliste insiste sur « le souci d’être contradictoire et de se forcer à penser contre soi-même ». Mais n’est-ce pas là le minimum requis dans tout travail journalistique ? Pour cet ancien correspondant du Monde à Téhéran et Jérusalem, la principale difficulté semble être son manque de connaissances de la région. « Il a fallu que je m’adapte à ces sociétés et que je m’identifie aux personnes qui les composent afin de comprendre un environnement qui ne m’est pas familier. Il serait plus facile pour moi de couvrir l’Europe. C’est un environnement que je connais mieux. » Mais ne serait-il pas plus difficile de « penser contre soi » dans ce cas ?
Polyphonie médiatique
La question demeure sur ce qui fait la particularité de la région et rend son traitement médiatique plus délicat. Une possible explication serait celle de la complexité et de la diversité des sociétés qui composent la région. Et c’est justement ce que certains médias occidentaux omettent lorsqu’ils considèrent la région comme un seul bloc monolithique. Les erreurs fréquentes de localisation des pays sur carte par des chaînes comme Fox News n’en sont que les exemples les plus flagrants. Donnant l’exemple de l’Agence France Presse, Alain Frachon affirme que « bien que l’agence emploie des journalistes locaux, le récit de l’AFP demeure un récit français de l’actualité. Il est bon de confronter le récit occidental à un autre récit. L’Occident n’a plus le monopole des médias. On est passé d’un état de monophonie à celui de polyphonie médiatique ». Pour Frachon, l’émergence de récits alternatifs, à travers des chaines comme Al Jazeera, est tout aussi bénéfique à la région qu’à la profession.
09:52 Écrit par OUTALHA dans Multimédia | Lien permanent | Commentaires (0) | Facebook | |
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