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16/12/2012

Egypte : les coptes votent en masse contre la nouvelle Constitution

Jour de mobilisation à Choubra. Le grand quartier copte du Caire s'est rendu en masse aux urnes, samedi 15 décembre, pour participer au référendum sur le très controversé projet de Constitution défendu par le président islamiste Mohamed Morsi.

Alors que dans d'autres quartiers de la capitale égyptienne, la participation semble moyenne, voire faible, par rapport aux législatives et à la présidentielle du premier semestre 2012, pas d'hésitation à Choubra. "Ce scrutin est le plus important, plus important que la présidentielle", confie Magdy, fonctionnaire, en faisant les cent pas anxieusement devant une école accueillant un bureau de vote. "Un président, on en élit tous les quatre ans, mais une Constitution, c'est pour très longtemps. Ça n'arrive qu'une fois dans la vie." D'abord à mots couverts, puis de plus en plus ouvertement, Magdy dévoile son opposition au projet de loi fondamentale : "Je n'ai pas le sentiment que nous avons été écoutés. Tout a été discuté en vitesse et en secret entre islamistes. L'Egypte est comme une grande famille. Il ne faut oublier personne si l'on ne veut pas diviser la nation."

Emad, son voisin, se fait plus explicite : "Je n'ai rien contre la religion musulmane, mais j'ai l'impression qu'ils veulent nous imposer la charia alors que nous sommes chrétiens. La loi, la Constitution, c'est pour tout le monde. Qu'est-ce que la doctrine sunnite et l'université islamique d'Al-Azhar ont à voir avec ça ? Déjà, des maîtresses d'école coupent les cheveux des petites filles qui ne portent pas le voile. Qu'est-ce qui va se passer avec cette Constitution ?" Il craint par dessus tout que la loi fondamentale, d'inspiration islamiste, légitime les descentes musclées des salafistes contre les débits de boissons ou les lieux mixtes. "Regardez cette file d'attente, s'exclame Emad. Elle fait tout le tour du bâtiment. Eh bien, je peux vous assurer que pas un chrétien ici ne va voter oui. Si le scrutin est propre, le non doit l'emporter, c'est mathématique."

"IL VEUT NOUS EMPÊCHER DE VOTER !"

Soudain, deux salafistes se plantent devant lui et s'invitent dans la conversation. Barbe teinte au henné et costume bleu électrique pour l'un, orange pour l'autre, ils se présentent comme des avocats. Emad et Magdy se font soudain silencieux et baissent la tête. "A quoi sert de voter non ?, s'interroge le premier avocat, Hazem Rushdie. Rien ! Parce qu'on va présenter un nouveau projet et l'autre moitié du peuple votera contre. C'est un bon texte, le pays a besoin de stabilité. Ne perdons pas de temps, la transition a assez duré comme ça !" Les deux compères repartent, soulevant des murmures réprobateurs dans leur sillage.

Devant l'école de la rue de l'imam Mohamed Abdou, la tension monte devant un autre centre électoral. En début d'après-midi, l'affluence est telle que les électeurs, là aussi majoritairement coptes, s'impatientent. Un homme accuse le juge du 23e bureau de faire des pauses intempestives et d'interrompre le vote sans explication : "C'est un partisan des Frères, il veut nous empêcher de voter, c'est clair !", assure-t-il. "Déjà qu'ils ont ouvert avec une heure de retard ce matin." "Mais non", tente de le rassurer un autre. "Il y a trop de monde, c'est tout. Prends patience ou reviens tout à l'heure."

Tandis que l'opposition dénonçait dés la mi-journée plusieurs cas de fraude, les autorités ont retardé la fermeture des bureaux à 21 heures à cause de la désorganisation initiale, qui a fait prendre pas mal de retard dans l'organisation du scrutin. Le boycott d'une grande partie des juges a obligé les autorités à étaler les opérations de vote sur deux samedis consécutifs. Le gouvernorat de Guiza, face au Caire, sur la rive occidentale du Nil, votera ainsi samedi 22 décembre. Les résultats du premier tour seront connus dans la nuit de samedi à dimanche. Ils risquent de relancer la tension dans tout le pays d'ici au second tour, qui sera décisif.

QUESTION DE CONFIANCE SUR LE PRÉSIDENT MORSI

Le référendum s'est en effet transformé en question de confiance sur le président islamiste Mohamed Morsi, qui a cherché à faire passer en force la Constitution en s'affranchissant de tout contrôle judiciaire. Le recours des Frères musulmans à leur service d'ordre pour disperser, à coups de pierres et d'armes à feu, un sit-in d'opposants devant le palais présidentiel, le 5 décembre, a particulièrement effrayé.

Pendant la campagne pour le référendum, des cheikhs ont appelé à voter "oui" dans les mosquées, menaçant les "nonistes" des flammes de l'enfer. Des leaders de la confrérie n'ont pas hésité à désigner les coptes comme les principaux opposants à la "stabilité" du pays. Une stigmatisation qui fait craindre aux coptes d'être traités comme des étrangers dans leur propre pays à l'avenir. "Mais on ne peut pas être des étrangers ici, rétorque Gaber, un ouvrier copte de Choubra. On n'a pas d'autre pays où aller, nous avons toujours été là, depuis les pharaons."

17:53 Écrit par OUTALHA dans international | Lien permanent | Commentaires (0) |  Facebook | | |  Imprimer | |

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