Pourquoi cette levée de boucliers chez certains nantis contre la taxation, exceptionnelle et limitée dans le temps, des hauts revenus ?

Relance ou austérité, un dilemme trompeur (25/11/2012)

On a raison de saluer les débuts impeccables de la diplomatie économique hollandaise. Mais si la croissance tend à l'emporter sur l'austérité dans l'esprit des dirigeants mondiaux, son contenu, notamment en Europe et en France, reste à définir. Explications.

Relance ou austérité ? En un mois, le rapport de forces sur ces deux options s'est trouvé complètement bouleversé. Angela Merkel qui s'était affirmée comme l'incontournable leader de l'Union européenne dès lors que Nicolas Sarkozy suivait sa politique, a semblé quelque peu déstabilisée par la geste hollandaise : non seulement le Français, lorsqu'il était candidat, s'était engagé à ne pas signer le Traité dit Merkozy, posant un acte de rupture inhabituel pour le Parti socialiste, mais en outre, une fois président, il a trouvé de nombreux alliés sur la scène internationale : de l'Espagnol Rajoy à l'Américain Obama jusqu'à l'Anglais Cameron (sur la Syrie, mais un accord pourrait aussi être trouvé sur la régulation bancaire), mine de rien, la diplomatie hollandaise est en train de montrer à l'Allemagne qu'elle n'est pas forcément le passage obligé pour la France. « François Hollande », note Jean-Pierre Chevènement, « semble avoir noué une relation d'empathie avec Obama. Le New York Times titre : L'Allemagne est isolée, et c'est le président français qui défend l'Allemagne. C'est bien joué et réalisé avec élégance. »

 Cette percée diplomatique hollandaise était prévisible. D'ailleurs certains l'ont largement anticipée, y compris dans nos colonnes. D'abord parce que deux ans de politique d'austérité ont donné de forts médiocres résultats. La récession sera de 1,3% en Italie selon les prévisions de Bruxelles; l'Espagne replonge au premier trimestre 2012 avec -0,3%; le taux de chômage, proche de 25% et la faillite de la banque Bankia, que l'Etat doit refinancer à hauteur de 23 milliards vont peser sur les taux d'intérêt de la dette espagnole qui dépasse les 6%; les Pays Bas, autrefois de bons élèves de la rigueur, vont à leur tour connaître une récession de 0,5% en 2012; le Portugal prévoit - 3%; quant à l'Irlande, considérée naguère comme un dragon européen, elle a connu la pire récession de toute l'Europe depuis la guerre : - 11,6% en deux ans ! Et ne parlons pas de la Grèce...
Bref, la potion amère imposée par Angela Merkel n'est pas loin de se retourner contre les pays excédentaires. Après tout, l'Allemagne tire une grande partie de son excédent commercial de ses exportations dans le reste de l'Europe. Pour aider l'Allemagne, il fallait donc dire nein à Angela.  Henri Guaino doit en manger son chapeau...

 Mais si l'idée de relance s'est imposée, notamment de façon assez évidente aux Etats-Unis, les moyens de cette relance tardent à être définis. François Hollande a évoqué la création d'euro-obligations. L'idée a surpris certains économistes, car un bond en avant vers l'Europe fédérale est assez peu imaginable dans les temps impartis par les nécessités de la crise, sauf à piétiner joyeusement les constitutions sur lesquelles se sont appuyés les états européens. Autrement dit, il faut combler des trous tout de suite sans attendre qu'une « police fédérale » puisse garantir la bonne exécution d'un plan de remboursement du prêt consenti. C'est ainsi que la prétention du gouvernement Rajoy à se passer des services de l'Union européenne  présente toutes les apparences d'une fuite en avant qui inquiète énormément les opérateurs des marchés : l'état paierait en obligations d'état espagnoles les actions de la banque, celle-ci les apportant à la BCE.  Bonjour, le coup de bonneteau ! Le blogueur iconoclaste faisait remarquer qu'en 2008, nombre d'économistes louaient la solidité des banques espagnole s...

Il faudrait aussi définir les modalités d'une relance de type keynésien. La relance par la consommation paraît difficile compte tenu du niveau d'endettement maximal des ménages dans les pays du sud et de la nécessité d'augmenter les recettes fiscales. Quant aux salaires du privé, comment les augmenter alors qu'il n'existe toujours aucune digue contre la concurrence déloyale des pays émergents ? Une relance sans protection du redressement industriel - que ça soit sous la forme monétaire ou règlementaire - aboutit à favoriser la croissance ... dans les pays émergents. ce serait généreux pour le tiers-monde, comme on disait avant. Mais diablement inefficace pour les salariés européens.  

 « La relance par l'investissement est plus jouable », note l'économiste Jean-Luc Gréau. « Mais les fonds structurels européens ont déjà généré des autoroutes, des TGV et des aéroports d'Athènes à Lisbonne. Il faudrait donc des plans d'investissements dans les énergies renouvelables. Il faudrait pour cela mobiliser la Banque européenne d'investissements, comme le demande François Hollande. Mais ce type d'investissement n'est pas à la hauteur de la crise de la demande que connaît l'Europe. » Ajoutons que, là encore, l'efficacité recommande de rompre avec le libre-échangisme de l'Union européenne : les industriels français comme allemands, qui ont cru possible d'investir dans le solaire ont été étrillés par leurs concurrents chinois qui n'avaient, eux, aucune norme sociale ou environnementale à respecter.

Enfin, la relance en Europe pourra moins qu'auparavant jouer sur la demande extérieure. Le ralentissement de la croissance dans les pays émergents, et notamment en Chine, où les chiffres officiels le minorent sans doute, montre que l'on ne pourra pas jouer sur les leviers traditionnels des années 1990 et 2000. Rebond de la crise des la dette, blocage européen, ralentissement de la croissance mondiale, après les législatives, la partition de François Hollande va être difficile. Elle appelle un choc de croissance plutôt que des exhortations. Il faut espérer que ses équipes y sont préparées...

20:06 Écrit par OUTALHA | Lien permanent | Commentaires (0) |  Facebook | | |  Imprimer | |